Murs, ville Et port, Asile De mort, Mer grise Où brise La brise Tout dort. Dans la plaine Nait un bruit. C'est l'haleine De la nuit. Elle brame Comme une âme Qu'une flamme Toujours suit. La voix plus haute Semble un grelot. D'un nain qui saute C'est le galop. Il fuit, s'élance, Puis en cadence Sur un pied danse Au bout d'un flot. La rumeur approche, L'écho la redit. C'est comme la cloche D'un couvent maudit, Comme un bruit de foule Qui tonne et qui roule Et tantôt s'écroule Et tantôt grandit. Dieu! La voix sépulcrale Des Djinns!... - Quel bruit ils font! Fuyons sous la spirale De l'escalier profond! Déjà s'éteint ma lampe, Et l'ombre de la rampe.. Qui le long du mur rampe, Monte jusqu'au plafond. Cris de l'enfer! voix qui hurle et qui pleure! L'horrible essaim, poussé par l'aquilon, Sans doute, o ciel! s'abat sur ma demeure. Le mur fléchit sous le noir bataillon. La maison crie et chancelle penchée, Et l'on dirait que, du sol arrachée, Ainsi qu'il chasse une feuille séchée, Le vent la roule avec leur tourbillon! Prophète! Si ta main me sauve De ces impurs démons des soirs, J'irai prosterner mon front chauve Devant tes sacrés encensoirs! Fais que sur ces portes fidèles Meure leur souffle d'étincelles, Et qu'en vain l'ongle de leurs ailes Grince et crie sur ces vitraux noirs! De leurs ailes lointaines Le battement décroit. Si confus dans les plaines, Si faible, que l'on croit Ouïr la sauterelle Crier d'une voix grêle Ou pétiller la grêle Sur le plomb d'un vieux toit. Les Djinns funèbres, Fils du trépas, Dans les ténèbres Pressent leur pas; Leur essaim gronde; Ainsi, profonde, Murmure une onde Qu'on ne voit pas. Ce bruit vague Qui s'endort, C'est la vague Sur le bord; C'est la plainte Presque éteinte D'une sainte Pour un mort. On doute La nuit... J'écoute: - Tout fuit, Tout passe; L'espace Efface Le bruit.