Nos esprits libres et contents Vivent en ces doux passe-temps. Et par de si chastes plaisirs, Bannissent tous autres desirs. La danse, la chasse et les bois, Nous rendent exempts des lois Et des misères dont l'Amour Afflige les cœurs de la Cour. Et c'est plustôt avec cet art Qu'avec la pointe de ce dard Que cette troupe se défend Des traits de ce cruel Enfant. Car en changeant toujours de lieu Nous empêchons si bien ce Dieu, Qu'il ne peut s'assurer des coups Qu'il pense tirer contre nous. Ainsi nous défendant de lui Et passant nos iours sans ennemi, Nous essayons de lui ravir La gloire de nous asservir. Il est bien vrai qu'en nous sauvant, Il nous va toujours poursuivant, Et nous poursuit en tant de lieux, Qu'en fin il entre dans nos yeux. Mais encor' qu'on puisse penser Qu'alors il nous doive offenser, Pourtant nous n'avons point de peur Qu'il nous puisse enflamer le cœur. Car la neige de notre sein Empêche si bien son dessein, Qu'alors qu'il nous pense enflammer Son feu ne se peut allumer.